Benjamin Tal - Le ralentissement de la croissance des petites entreprises signale-t-il une morosité économique?
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Le ralentissement de la croissance des petites entreprises signale-t-il une morosité économique?

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Benjamin Tal
Économiste en chef adjoint,
Marchés mondiaux CIBC

« Le présent cycle économique dure depuis très longtemps. Il s’agit du troisième plus long cycle jusqu’à présent et, dans quelques trimestres, il pourrait atteindre la deuxième place à cet égard. En outre, la croissance des petites entreprises commence à ralentir. Ces dernières mènent généralement la danse en matière de cycles économiques. Les petites entreprises ne contribuent qu’à environ 30 % de la croissance économique. Par contre, elles représentent 95 % des entreprises au sein de l’économie. On peut donc en conclure qu’elles constituent un important segment de l’économie. Depuis peu, certains signes révèlent que la croissance des petites entreprises au Canada commence à s’essouffler. Leur rythme d’embauche ralentit et leur niveau de confiance est bas. Cela signifie que l’économie ralentira probablement dans les deux ou trois prochains trimestres ainsi qu’en 2018. Il s’agit d’un signal très important du point de vue des placements, car puisque ces entreprises mènent l’économie, elles nous informent sur la direction que celle-ci prendra. Les grandes entreprises leur emboîteront aussi le pas. »

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Défis en vue

« Bon nombre de ces petites entreprises nous indiquent qu’elles sont aux prises avec de graves difficultés. Non seulement le cycle économique est avancé, mais nous observons également une hausse du salaire minimum. Qui plus est, les propositions d’ordre fiscal sont très néfastes pour les petites entreprises. Et puis, il y a l’ALENA. Même si bon nombre de petites entreprises sont très peu impliquées dans ce type de commerce, environ 50 % à 60 % d’entre elles se disent très préoccupées à propos de l’ALENA. Ce facteur influe déjà sur leur processus décisionnel. Le dollar, soit sa valeur et sa récente appréciation, n’est pas le facteur le plus déterminant. D’un point de vue rétrospectif, il n’y a jamais eu de véritable corrélation entre la confiance des petites entreprises et la valeur du dollar. L’appréciation du dollar nuira à certaines entreprises exportatrices de biens et services. En revanche, les importateurs vont en tirer parti. Il y a donc un certain équilibre. Malgré tout, quelques entreprises en pâtiront. »

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L’incidence de la hausse des taux

« Comme nous le savons tous, la Banque du Canada a commencé à relever les taux d’intérêt. Les petites entreprises sont sensibles au risque de hausse des taux d’intérêt, mais non pas parce qu’elles sont lourdement endettées. En fait, c’est plutôt l’inverse : malgré la faiblesse des taux d’intérêt, les petites entreprises ont résisté à la tentation d’emprunter. Elles ont choisi de ne pas s’endetter, et c’est tout à leur honneur. Cela dit, elles sont très sensibles au risque accru de hausse des taux d’intérêt auquel sont exposés les consommateurs, car 80 % à 90 % de leurs activités sont liées à ces consommateurs.
La consommation ralentira en raison de la hausse des taux d’intérêt. De toute évidence, le marché de l’habitation connaîtra un ralentissement, ce qui est déjà le cas, d’ailleurs. Cela influera sur la confiance des consommateurs, pour ensuite se répercuter sur la capacité des entreprises à prospérer. La bonne nouvelle est que la Banque du Canada ne procédera pas de sitôt à une hausse vertigineuse des taux d’intérêt. Elle a relevé les taux d’intérêt de 50 points de base. Elle attendra un peu avant de les augmenter de nouveau, car l’inflation n’est pas à la hausse. Une appréciation du dollar canadien ralentirait l’économie. Par conséquent, la Banque du Canada laisse entendre que l’économie, les consommateurs et les petites entreprises auront suffisamment de temps pour s’ajuster à la nouvelle réalité. »

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Moteurs de croissance

« Si l’on se penche sur le secret de la réussite, il est intéressant de constater que de nombreuses entreprises croissent assez rapidement, car elles profitent grandement de l’externalisation. Essentiellement, les petites entreprises se voient confier énormément de travail des grandes sociétés. La relation entre les petites et les grandes entreprises est très importante sur le plan de la croissance globale, car nombre de grandes entreprises sont exportatrices. Il est donc particulièrement crucial pour les propriétaires de petite entreprise et leur avenir de diversifier leurs activités et d’accroître leurs exportations. Par ailleurs, il va sans dire que bon nombre de ces entreprises sont relativement jeunes, et plus une entreprise est jeune, plus elle croît rapidement. »

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Signaux pour les investisseurs

« En ce qui concerne les placements, je crois que pour observer l’ensemble du marché boursier, il faut se fier à certains signaux ou indicateurs avancés. À mon avis, nous pouvons observer le segment des petites entreprises, car il ouvre le bal des cycles. Il nous indique approximativement l’orientation de l’économie, et ce, avant même le marché boursier, car il n’est pas composé d’actions crédibles. Les petites entreprises sont le résultat de décisions prises par des gens sur une base quotidienne. Elles mènent l’économie. Les petites entreprises nous révèlent que le taux de croissance du PIB passera de 4,5 % à environ 2 %. Voilà l’un des signaux que nous percevons. Dans ce cas-ci, je réduirais mes placements dans des actions axées sur la croissance et me tournerais vers les actions axées sur la valeur, car elles se comportent généralement bien lorsque l’économie commence à ralentir. »