Actions-mèmes et liquidation forcée

Lorsqu’une entreprise est mal en point, les investisseurs peuvent prendre des positions à découvert sur ses actions. Par exemple, un investisseur emprunte des actions de la société ABC et les vend lorsque le cours est de 100 $ par action. L’investisseur espère que le cours des actions baissera, par exemple à 40 $ par action. L’investisseur achète alors les actions du marché et les retourne au prêteur, empochant un profit brut de 60 $ par action. Le bénéfice net serait inférieur, après la prise en compte des intérêts payés pour emprunter les actions, des commissions pour acheter et vendre les actions et de l’impôt sur les gains en capital sur l’augmentation de la valeur de la position à découvert.

Il s’agit là du fonctionnement d’une position à découvert ordinaire, où le cours de l’action a probablement diminué pendant un certain temps. Supposons maintenant que des foules de spéculateurs, influencés par les médias sociaux, commencent à acheter les actions d’une entreprise malmenée. Cela entraîne une remontée du cours de l’action et crée une tendance sur les médias sociaux qui pousse plus de spéculateurs à en acheter, possiblement attirés par le fait de faire de l’argent au détriment des fonds de couverture et d’autres grands investisseurs qui sont souvent à découvert. Les investisseurs à découvert doivent ensuite couvrir leurs positions en achetant les actions, puisqu’ils perdent de l’argent lorsque le cours de l’action augmente. Lorsqu’un grand nombre d’investisseurs à découvert se dépêchent de couvrir leurs positions en même temps, une hausse encore plus importante du cours de l’action peut survenir – il s’agit là d’une liquidation forcée. La hausse rapide est généralement suivie d’une chute vertigineuse. La raison est que la hausse du cours de l’action a été causée par de la spéculation, plutôt que par un changement réel de la position de la société.

Pour repérer les actions susceptibles de faire l’objet d’une liquidation forcée, il faut d’abord examiner le ratio de positions à découvert. Celui-ci indique le pourcentage de participation à découvert dans les actions d’une société par rapport à toutes les actions en circulation. Par exemple, un ratio de positions à découvert de 10 % indique que 10 % des actions en circulation d’une société sont détenues dans des positions à découvert, tandis que les 90 % restants sont détenus dans des positions acheteur. Généralement, un ratio de positions à découvert de 10 % est considéré comme élevé, et un ratio de 20 % est considéré comme très élevé. Les positions à découvert peuvent s’accumuler dans les sociétés ayant une dette élevée, des bénéfices négatifs et des perspectives faibles pour le secteur – fort possiblement le contraire de ce que les investisseurs rechercheraient avec des positions acheteur. Les investisseurs pourraient vouloir rechercher un ratio de positions à découvert qui n’est pas en baisse, et de préférence en hausse, car un ratio de positions de découvert en baisse peut permettre aux investisseurs à découvert de couvrir leurs positions sans déclencher une liquidation forcée.

En plus du ratio de positions de découvert, les investisseurs peuvent examiner la couverture des positions à découvert. Par exemple, si 100 000 actions sont détenues à découvert et que le volume quotidien moyen des actions négociées est de 20 000, il pourrait s’écouler cinq jours avant que les positions à découvert soient couvertes – un niveau minimal que les investisseurs recherchent habituellement au moment de repérer des candidats à une liquidation forcée.

Mais ce n’est que le point de départ pour repérer les occasions. Pour repérer un candidat à une liquidation forcée, vous devez trouver des actions malmenées dont le cours est susceptible de grimper. De façon générale, il y a trois façons de procéder :

• Analyse fondamentale – Une analyse fondamentale est intellectuellement difficile, car vous devez trouver des indices qui n’ont pas été repérés par les analystes et les investisseurs professionnels qui surveillent l’action.
• Analyse des sentiments – Une analyse des sentiments est difficile à mener pour des raisons différentes, car il faut analyser les publications, les vidéos ou les mèmes sur les médias sociaux, qui sont souvent publiés par des utilisateurs anonymes dont les connaissances, les affiliations et les motivations peuvent être incertaines.
• Analyse technique – Une analyse technique peut fournir des indices de liquidation forcée, confirmant ou anticipant parfois des changements dans les indicateurs fondamentaux et des sentiments. Les outils techniques à prendre en considération comprennent l’indice de force relative (RSI), la MACD (Moving Average Convergence Divergence) et la variation du cours sur un jour.

L’art de la liquidation forcée consiste à interpréter les indicateurs fondamentaux, techniques et de sentiment, puis à effectuer des achats et des ventes alors que le cours de l’action fluctue très rapidement.

Mettons de côté les actions-mèmes et les liquidations forcées pendant un moment et réfléchissons en général aux avantages qu’un investisseur individuel pourrait avoir par rapport aux grands investisseurs institutionnels. Nous reviendrons ensuite à la question de la négociation d’actions-mèmes.

Avantage lié au temps

L’avantage le plus important qu’un investisseur individuel a par rapport aux grands investisseurs institutionnels est probablement sa liberté de suivre à long terme sa conviction à l’égard des placements. Les gestionnaires professionnels courent le risque d’être congédiés par les clients ou d’être soumis à des pressions par les comités de placement pour seulement quelques trimestres de rendement inférieur à un indice de marché ou à un portefeuille de référence, tandis que les investisseurs individuels peuvent conserver un placement pendant des années, voire des décennies, aussi longtemps qu’ils en ont la capacité. Bien que les investisseurs individuels puissent souvent se laisser distraire par les fluctuations à court terme des marchés, leur potentiel de rendement est plus prometteur s’ils adaptent une approche à long terme.

Avantage psychologique

Un investisseur individuel peut être plus indépendant et plus ouvert d’esprit que les grands investisseurs, où les approches en équipe et les décisions fondées sur les comités sont la norme. Cela peut donner aux investisseurs individuels un avantage psychologique important dans leurs placements, car les biais cognitifs et émotionnels peuvent être difficiles à détecter et à contourner en groupe.

Avantage lié au risque

Un investisseur individuel peut prendre plus de risques qu’une grande institution, par exemple en ayant une participation précoce dans une société technologique. C’est en partie en raison de la taille : une personne peut raisonnablement engager de 5 % à 10 % d’un portefeuille de 1 million de dollars dans une occasion très prometteuse, ce qui est pratiquement impossible pour une institution ayant un portefeuille de 100 milliards de dollars.

Ces avantages deviennent encore plus importants lorsqu’un investisseur s’engage fermement à saisir une occasion prometteuse, alors que celle-ci n’est pas reconnue ou populaire, et à respecter ses convictions pendant longtemps.

Voyons maintenant ce qu’il advient de ces avantages lorsque les investisseurs négocient des actions-mèmes. En ce qui concerne leur avantage lié au temps, les investisseurs se détournent des positions qu’ils pourraient détenir à long terme, et s’orientent plutôt vers des positions qu’ils conserveront pendant quelques jours ou quelques semaines. En ce qui concerne leur avantage psychologique, les investisseurs s’exposent à la pensée de groupe par l’intermédiaire du comportement des spéculateurs et des négociateurs sur les plateformes de médias sociaux. En ce qui concerne leur avantage lié au risque, les investisseurs, au lieu d’acquérir des positions relativement importantes que d’autres ne pourraient pas accepter, investissent maintenant probablement des montants relativement petits dans des actions à volume élevé.

Cela soulève un point plus large que les actions-mèmes. Plutôt que de commencer par un placement, les investisseurs peuvent commencer par eux-mêmes et se demander si un placement leur permet de tirer parti de leurs forces. Warren Buffett a parlé de l’importance d’avoir un « cercle de compétence » et d’investir en fonction de celui-ci. Ce point est semblable au cercle de compétence – un avantage que chaque investisseur peut définir pour lui-même.

• Lorsque le cours des actions-mèmes augmente, c’est parfois pour entraîner une liquidation forcée. Cela se produit lorsque les spéculateurs se montrent optimistes envers une action malmenée et que les investisseurs à découvert se dépêchent de couvrir leurs positions à découvert, ce qui fait davantage augmenter le cours.
• Les liquidations forcées peuvent être difficiles à prédire, que l’on utilise une analyse fondamentale, une analyse des sentiments ou une analyse technique. De plus, il peut être difficile d’effectuer les opérations au bon moment, car il faut prendre de bonnes décisions d’achat et de vente alors que le cours de l’action fluctue très rapidement.
• Les investisseurs individuels ont potentiellement plusieurs avantages importants par rapport aux investisseurs institutionnels, notamment en ce qui a trait à l’horizon de placement, à la psychologie et au risque. Les investisseurs peuvent réfléchir à la façon dont ces avantages, ainsi que d’autres qu’ils pourraient avoir, sont susceptibles d’être touchés par la négociation d’actions-mèmes.