Le pouvoir du portefeuille : Rééquilibrage
Deux façons de rééquilibrer votre portefeuille et une exception pour les actions très performantes.
Pro-Investisseurs CIBC
30 avr. 2025
Lecture de 7 minutes
Cette série d’articles sur la puissance du portefeuille explore les principaux aspects de la gestion de portefeuille, soit les décisions qui concernent le portefeuille dans son ensemble, plutôt que chacun des placements individuellement. Nous nous penchons sur le quotidien de la gestion de portefeuille : rééquilibrage, changes et gestion de la trésorerie. Ce sont des sujets très connus des investisseurs professionnels, mais moins des investisseurs autonomes. Nous espérons que cette série aidera ces derniers à exploiter toute la puissance de leur portefeuille. En matière de placement, la réussite à long terme ne consiste pas toujours à battre le marché, mais à prendre de bonnes habitudes.
Le présent article traite de la notion de rééquilibrage. Avec le temps, vous constaterez probablement que certains placements montent ou baissent plus que d’autres. C’est là que la notion de rééquilibrage entre en jeu. Quand vous rééquilibrez votre portefeuille, vous le ramenez à sa répartition d’actif cible. Imaginons par exemple que vous vouliez un portefeuille composé de 70 % d’actions et de 30 % d’obligations, mais que vous vous retrouviez avec 90 % d’actions et 10 % d’obligations à la suite de l’envolée du marché boursier. Le rééquilibrage serait alors une façon de dire : « Dites, j’avais demandé 70/30, pas 90/10 ». Le présent article se penche sur les deux principaux types de rééquilibrage, soit le rééquilibrage à intervalles régulier et le rééquilibrage en cas de déviation de la répartition d’actif cible. Nous verrons pour finir, qu’avec les actions très performantes, le rééquilibrage n’est pas forcément la meilleure option.
Le rééquilibrage à intervalles réguliers
Le plus souvent, on rééquilibre son portefeuille à intervalles réguliers, par exemple une fois par an en janvier. En d’autres termes, que le marché ait gagné ou perdu du terrain, vous procèderez au rééquilibrage à la date choisie. La fréquence de rééquilibrage dépend habituellement de votre horizon de placement. Si vous investissez sur 10 à 20 ans, par exemple, un rééquilibrage annuel sera probablement une bonne idée.
Certains investisseurs veulent le faire au moment idéal, et privilégieront parfois une saison spécifique ou préféreront rééquilibrer leur portefeuille tous les neuf mois plutôt que tous les douze mois. À long terme, il n’y a pas de formule parfaite. Le mieux est d’opter pour une fréquence qui convient à votre horizon de placement et de vous y tenir puisque l’idée est, de toute façon, de ne pas vous retrouver avec un niveau de risque beaucoup plus élevé que prévu.
Rééquilibrage en cas de déviation des pondérations cibles
L’autre type de rééquilibrage le plus courant est celui auquel on procède quand les pondérations ont trop varié de la cible. Les investisseurs se fixent des pondérations minimales et maximales pour chacune des catégories d’actif. Si le portefeuille sort de ces pondérations minimales et maximales, la part des actifs concernés est réalignée sur la cible. Prenons un exemple, à l’aide d’un portefeuille d’actions :
Action |
Minimum |
Cible |
Maximum |
Action prometteuse A |
10,00% |
20,00% |
30,00% |
Action ordinaire B |
15,00% |
20,00% |
25,00% |
Action ordinaire C |
15,00% |
20,00% |
25,00% |
Action ordinaire D |
15,00% |
20,00% |
25,00% |
Action stable E |
17,50% |
20,00% |
22,50% |
Vous noterez que les fourchettes de pondération varient selon les groupes d’actions :
- Action prometteuse A : peut varier de plus ou moins 10 % par rapport à la pondération cible. L’investisseur s’attend à ce que cette action fluctue beaucoup et ne souhaite pas procéder à un rééquilibrage en cas de variations limitées ou modérées.
- Actions ordinaires B à D : peuvent varier de plus ou moins 5 % par rapport à la pondération cible. L’investisseur procède à un rééquilibrage en cas de fluctuations modérées.
- Action stable E : peut varier de plus ou moins 2,5 % par rapport à la pondération cible. L’investisseur s’attend à ce que cette action ne fluctue pas beaucoup et souhaite donc procéder à un rééquilibrage en cas de variations importantes. Des variations importantes pourraient le pousser à prendre une partie de ses bénéfices ou à procéder à un rééquilibrage pour limiter ses pertes.
Après réflexion, l’investisseur estime que les actions ordinaires B, C et D ne justifient pas le même traitement. Il décide de ramener la pondération minimale de l’action ordinaire B de 15 % à 12,5 % et donc de lui permettre de tomber plus bas; il estime en effet que cette action est plus résistante que les autres actions ordinaires. Il décide par ailleurs de porter la pondération maximale de l’action ordinaire D de 25 % à 27,5 % (de la laisser monter plus haut), puisqu’il estime qu’elle a davantage de potentiel que les autres actions ordinaires. Voici donc les nouvelles fourchettes de pondération :
Action |
Minimum |
Cible |
Maximum |
Action prometteuse A |
10,00% |
20,00% |
30,00% |
Action ordinaire B |
12,50% |
20,00% |
25,00% |
Action ordinaire C |
15,00% |
20,00% |
25,00% |
Action ordinaire D |
15,00% |
20,00% |
27,50% |
Action stable E |
17,50% |
20,00% |
22,50% |
Cet exemple montre bien qu’il n’est pas obligatoire d’appliquer la même stratégie de rééquilibrage à tous les actifs. Il s’agit de trouver la méthode qui vous convient, en fonction du type de placements détenus.
Quel type de rééquilibrage choisir?
Voyons s’il vaut mieux procéder à un rééquilibrage à intervalles réguliers ou en cas de déviation des pondérations cibles.
Il est souvent plus facile de procéder à des rééquilibrages réguliers. C’est le calendrier qui vous dit quand rééquilibrer et c’est tout le portefeuille qui est rééquilibré. Dans l’exemple ci-dessus, même si une seule des cinq actions a beaucoup fluctué et si les autres ont à peine varié, elles verront toutes leur pondération ramenée à 20 % du portefeuille.
Le rééquilibrage en cas de déviation des pondérations cibles peut être plus complexe. Supposons encore une fois qu’une des actions de notre exemple ait beaucoup bougé et les quatre autres, à peine. Plus précisément, la pondération de ces quatre dernières n’a pas suffisamment varié pour atteindre les seuils de rééquilibrage. Vous n’avez donc qu’une action à rééquilibrer. Que faire des liquidités libérées? Vous pouvez les investir dans les quatre autres actions, à parts égales ou au prorata de leurs pondérations respectives, ou encore garder l’argent en attendant que de nouvelles occasions se présentent.
Le rééquilibrage en cas de déviation des pondérations cibles nécessitera probablement des interventions plus fréquentes et davantage de décisions que le rééquilibrage à intervalles réguliers. Ce dernier conviendra donc probablement davantage à ceux qui souhaitent moins s’investir dans la gestion de leurs placements, tandis que le rééquilibrage en cas de déviation des pondérations cibles s’accordera davantage avec une méthode de placement plus active.
Peut-on se passer du rééquilibrage?
Le rééquilibrage, qu’il ait lieu à intervalles réguliers ou en cas de déviation des pondérations cibles, peut contribuer à la gestion des risques. Mais il peut arriver qu’un investisseur soit prêt à prendre plus de risques, par exemple dans le cas d’une action qu’il juge très prometteuse. Il souhaite la conserver pendant de longues années et sait que, même si une action grimpe avec le temps, elle peut monter et descendre en chemin, et que ces fluctuations justifieraient très probablement des ajustements s’il suivait un processus de rééquilibrage normal.
Il peut diviser son placement dans cette action et en laisser une partie dans son portefeuille habituel, qui fera l’objet de rééquilibrages, et mettre le reste dans un portefeuille « auxiliaire » qu’il ne rééquilibrera pas. Le placement restera habituellement immobilisé dans ce portefeuille auxiliaire, quelle que soit sa performance. Ce portefeuille auxiliaire s’inscrira parfois dans un compte de placement à part, pour qu’il n’empiète pas sur les activités de suivi et de rééquilibrage du portefeuille ordinaire. Dans des cas extrêmes, l’investisseur pourra décider de cantonner les actions très prometteuses à son portefeuille auxiliaire et de ne pas les intégrer à son portefeuille ordinaire.
Le rééquilibrage permet de gérer le risque en ramenant la pondération d’un actif à son niveau cible. Il permet à l’investisseur de conserver le niveau de risque souhaité, au lieu de suivre le niveau de risque imposé par le marché.
Le rééquilibrage a habituellement lieu à intervalles réguliers (une fois par année, en janvier, par exemple) ou en cas de déviation des pondérations cibles (quand l’actif atteint sa pondération minimale ou maximale). Le rééquilibrage à intervalles réguliers conviendra probablement davantage à ceux qui souhaitent moins s’investir dans la gestion de leurs placements, tandis que le rééquilibrage en cas de déviation des pondérations cibles s’accordera davantage avec une méthode de placement plus active.
Les investisseurs ne souhaitent pas forcément rééquilibrer les placements présentant un potentiel majeur à long terme. Il sera alors possible de conserver ces placements dans un portefeuille « auxiliaire » distinct, où ils resteront immobilisés pendant un certain temps et seront exclus des exercices de suivi et de rééquilibrage habituels.
La connaissance est votre atout le plus précieux